La traduction juridique, les testaments authentiques et la Cour de cassation : L’arrêt de l’Assemblée plénière du 17 janvier 2025

Publié le 31 mars 2025 par Charles EDDY, traducteur juridique à Lille, expert près la Cour d’appel de Douai (traducteur assermenté).


Lorsque traduction et droit se rencontrent à la Cour de cassation, il y a de fortes chances que ça m’intéresse. Je vous raconte donc une affaire.

Rédiger un testament dans une langue que l’on ne comprend pas

Lorsque Mme X se déplace chez le notaire en 2002, elle a déjà soufflé ses 76 bougies.

Elle souhaite préparer son testament authentique.

Elle est italienne, ne maitrise pas le français.

Son notaire, lui, ne maitrise pas l’italien.

Elle se fait donc accompagner par une interprète.

Pas une interprète professionnelle à vrai dire – une amie proche, pas sur la liste des experts judiciaires.

Dans le testament reçu ce jour, elle lègue la quotité disponible à ses trois filles vivantes, excluant de fait le fils de sa fille décédée.

Histoire d’un déshéritement incompris

Treize ans plus tard, en 2015, la testatrice passe de vie à trépas.

Le petit-fils, aimé de sa grand-mère, ne comprend pas son déshéritement. Il doit y avoir mépris : ce doit être la faute de l’interprète.

C’est en effet une proche, pas une « vraie » interprète.

Qui sait, après tout, si elle a fidèlement traduit la volonté de sa grand-mère ?

S’ensuit un riche contentieux (comprenant une rébellion de la cour d’appel de renvoi et un pourvoi devant l’Assemblée plénière) sur la langue et la traduction.

Est-il possible d’avoir recours à un interprète pour son testament ?

Pour résumer succinctement le droit dans cette affaire :

  1. Le recours à un interprète n’était pas autorisé dans le cadre d’un testament authentique avant la loi du 16 février 2015. C’est désormais possible, à condition de faire appel à un interprète inscrit sur la liste des experts judiciaires près une Cour d’appel ou la Cour de cassation.
  2. Ce testament pouvait-il néanmoins être déclaré valide en tant que testament international ? La Convention de Washington du 26 octobre 1973 autorise la rédaction du testament dans une langue non comprise du testateur en présence d’un interprète « répondant aux conditions requises par la loi en vertu de laquelle la personne habilitée à instrumenter a été désignée. »
  3. Or, la jurisprudence à la date du testament prévoyait que le testament reçu par le truchement d’un interprète était nul et la loi ne permettait pas le recours à un interprète. Les testaments reçus après la loi de 2015 obéissent à des règles différentes, mais celui-ci n’a pu être sauvé.

En tout cas, c’était l’occasion de suivre d’excellentes plaidoiries, dont celle (brillante) de Me Jean-Philippe Caston, source de l’extrait en vidéo ci-dessous.

Si l’affaire vous intéresse, je vous conseille de visionner les plaidoiries dans leur intégralité : https://www.youtube.com/watch?v=NSgkt5G647g.

Enfin, voici l’arrêt de la Chambre plénière (17 janvier 2025, n° 23-18.823) :

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Et pour un peu de lecture supplémentaire :





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